Le clivage philosophique en Belgique: religieux/laïque (Eglise/État)

L’opposition entre partisans d’une société fondée sur l’Église et ceux qui défendent une société laïque (c’est-à-dire indépendante de toute religion) constitue le 1er grand conflit intérieur qui va diviser la  population (dès la 2ième moitié du XIXème siècle) et ce, jusqu’à la fin des années 50’ (1958).

Au moment de l’indépendance belge, la religion catholique est celle d’une très large majorité de la  population. La question qui va se poser est celle des relations entre l’Église et l’État. Leur rôle respectif dans des domaines tels que l’organisation de l’enseignement et l’assistance aux plus démunis va agiter la vie politique. Le débat va opposer les catholiques qui entendent développer leurs œuvres caritatives et  leurs écoles et maintenir la prépondérance de la religion catholique dans l’État aux libéraux qui veulent l’indépendance du pouvoir civil et qui sont partisans d’un enseignement public et laïque. Ce problème ne  sera réglé (après une grave crise) qu’en 1958 avec la conclusion du « Pacte scolaire ». Ce pacte signé entre  les partis politiques prévoit que l’État doit apporter une aide à toutes les formes reconnues d’enseignement  (et donc aussi aux écoles catholiques). Il prévoit aussi la gratuité des études au niveau maternel, primaire et secondaire dans les institutions de l’État et dans celles qu’il subventionne (dont les écoles catholiques) ainsi que le contrôle des subventions accordées. Le pacte a également reconnu le libre choix entre le  cours de morale et celui de religion (catholique, protestante, israélite et plus tard islamique)

Remarque: Même s’il s’est estompé au fil des décennies, ce clivage (religieux/laïque)  transparaît en filigrane lorsque de grands débats éthiques ont lieu au sein de la société (avortement,  euthanasie, mariage homosexuel…).

Le clivage socio-économique Belge : possédants/travailleurs (gauche/droite)

Au milieu du XIXème siècle, la Belgique s’impose comme l’une des plus grandes puissances industrielles  du monde. Mais cette forte croissance n’engendre pas une juste redistribution des richesses produites. Le fossé se creuse très vite entre une bourgeoisie de plus en plus riche et une population ouvrière dont les  conditions de vie sont parmi les plus mauvaises d’Europe (misère effroyable, journées de travail  interminables, salaires ridiculement bas, cadences de travail infernales), sans compter qu’elle n’a pas le  droit de vote. Cette exploitation encourage la naissance d’un puissant mouvement ouvrier qui va, petit à  petit, s’imposer sur la scène politique. Les ouvriers vont s’organiser dans des sociétés d’entraide et des  mutualités. En 1885, le Parti Ouvrier belge (POB), ancêtre du Parti socialiste, voit le jour. Aux deux grands  partis bourgeois, que sont le parti catholique et le parti libéral, s’oppose alors un parti ouvrier qui va d’emblée lutter pour l’extension du droit de vote. Dans ce sillage, l’Église catholique va commencer à  s’intéresser au sort de la classe ouvrière et jeter les bases du mouvement ouvrier chrétien.

Les premières conventions collectives portant sur les conditions de travail et de salaires sont signées en 1919. D’autres lois sociales sont votées en 1936. Mais, la protection effective des travailleurs ne sera  assurée qu’en 1945, après la 2ième guerre mondiale, avec la mise en place de la sécurité sociale (la « Sécu »), système basé sur « la solidarité de tous pour tous » grâce auquel chaque travailleur peut bénéficier  de l’assurance maladie-invalidité, d’allocations familiales s’il a des enfants, d’indemnités de chômage s’il  perd son emploi et d’une pension lorsqu’il atteint l’âge de la retraite. Le budget de la « sécu » est financé  essentiellement par les cotisations versées par les travailleurs et les employeurs. La sécu est un des  grands acquis du combat syndical. Elle est le produit d’une concertation entre le monde patronal et le  monde syndical (le Pacte social de 1944) qui est devenue, depuis, un véritable modèle du genre. Cette  concertation se déroule aujourd’hui à tous les niveaux de la vie économique: de l’entreprise (conseil  d’entreprise…) à l’État (accord interprofessionnel qui dessine tous les 2 ans le cadre social minimum dans  lequel vivront les acteurs sociaux).

Ce clivage est toujours d’actualité aujourd’hui. D’aucuns veulent, notamment pour des questions  budgétaires (la sécurité sociale a un coût très élevé: les gens vivent de plus en plus vieux et le nombre de  personnes actives diminue) revenir sur certains de ces acquis. S’ajoute à cela le difficile problème de la  lutte contre le chômage qui frappe plusieurs centaines de milliers de personnes en Belgique. Enfin, il  convient de ne pas oublier le contexte mondial actuel marqué par la montée en puissance du capitalisme  financier et de politiques de dérégulation et de libération.